jeudi 16 août 2007

La transformation de la société

En novembre 2006, les éditions Gallimard ont publié une réédition du cours que donnait Elie Halévy (1870-1937) sur l’histoire du socialisme à l’Ecole des Sciences politiques.

« Doctrine économique avant tout, le socialisme moderne affirme qu’il est possible de remplacer la libre initiative des individus par l’action concertée de la collectivité dans la production et la répartition des richesses. » Le 20ème siècle a vu cette philosophie profondément démocratique verser dans la pire des tyrannies et le 21ème siècle commence avec un monde où le développement se construit sur la libre initiative et produit l’exclusion d’une population toujours plus nombreuse

La bonne idée du moment partout portée par tout le monde est la sécurisation des parcours professionnels pour mettre de la sécurité professionnelle dans un monde de flexibilité : la flexécurité semble être le mot magique susceptible de reproduire le miracle des pays du nord.

Mais, comme le montre l’effroyable rapport de prospective paru sous la direction de Jacques ATTALI avec la contribution de François CHEREQUE, l’avenir anoncé du travail n’est pas dans la sécurité et l’emploi pour tous.

C’est bien la gouvernance des entreprises qu’il s’agit d’investir ensemble (employeurs et salariés, clients et fournisseurs, Europe, États et collectivités territoriales) pour mettre en place un développement durable qui assure l’existence des Hommes d’aujourd’hui sans compromettre celle des générations futures.

Actuellement, la gouvernance des entreprises est aux mains des actionnaires et vise à capter le maximum d’argent des clients en dépensant le minimum de moyens (pressions sur les fournisseurs, limitation de la masse salariale et suppressions d’emplois, baisse des impôts et des charges, etc.) : c’est le modèle patrimonial de l’entreprise.

Le client doit se plier aux choix de mise à disposition des produits et des services (commercialisation en grandes surfaces sans accompagnement, centres d’appels pour le service après vente, etc.) de manière à ce que sa valeur (chiffre d’affaire unitaire et taille de la clientèle) coûte le moins cher possible et augmente la valeur marchande de l’entreprise.

L’entreprise externalise pour transformer ses salariés en fournisseurs – le droit commercial est plus souple que le droit du travail – et individualise ses rapports avec les salariés – un salarié seul est plus soumis qu’un salarié représenté par ses syndicats. Les salariés font parti de la domesticité, avec les fournisseurs, l’État qui apporte services et aides et les organismes sociaux qui contribuent au bon fonctionnement de la main-d’œuvre

La réponse du 20ème siècle a consisté à mettre en place une propriété publique sur les moyens de production, partielle à l’ouest, totale à l’est. Aujourd’hui, la réponse majoritaire est celle du laisser-faire la main invisible qui doit apporter le bonheur. Mais l’histoire ne s’arrête pas là, le libéralisme multipliant la pauvreté et les désordres environnementaux.

Même s’il est toujours celui de l’opposition d’intérêts (la lutte des classes), le 21ème siècle est plus complexe que le précédant. Pour rendre possible et productive la démocratie sociale, il faut passer à un modèle partenarial de l’entreprise entre propriétaire et salarié. Cette transformation exige d’amender le droit de propriété sur l’entreprise, les partenaires du capital ayant droit à intervenir sur les choix stratégiques de l’entreprise.

Il est faux de croire que les salariés ont moins d’intérêt au bon fonctionnement de l’entreprise que les propriétaires. C’est l’importance de la part des revenus dans ses ressources financières qui détermine l’importance de l’entreprise aux yeux de l’individu, qu’il soit propriétaire ou salarié. Or les richesses produites par l’entreprise alimentent une part plus importante des ressources d’un salarié que de celles d’un actionnaire qui dispose d’un portefeuille diversifié.

Sur 2,6 M d’entreprise 93% ont moins de 10 salariés, 99% moins de 50 salariés. La plupart ont un capital indépendant, le propriétaire étant lui-même investi dans le travail et retirant la majeure partie de ses revenus de son activité, comme les salariés. Les salariés des grandes entreprises ne supportent plus le mépris dans lequel les tient le patron, véritable mercenaire de propriétaires qui n’hésitent pas à sacrifier leur entreprise.

La majorité de la population a intérêt à s’approprier la conduite des entreprises. Seule cette majorité et tpute cette majorité réalisera la transformation de la société nécessaire au bien vivre ensemble. Et il est temps de la mobiliser pour rénover la maison démocratie en lui apportant son aile économique et sociale.