mardi 16 août 2011

Le putsch de l'été

Président de la banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet prescrit le plan détaillé que doit appliquer le gouvernement italien pour rassurer les marchés. La BCE troque ainsi son statut d'organisme indépendant à celui d'organisme dirigeant. Le putsch va-t-il réussir?

Le système bancaire de l'Union Européenne est construit sur le dogme de l'indépendance vis à vis du pouvoir politique. Traumatisée par l'hyperinflation de l'entre-deux guerres, c'est l'Allemagne qui a imposé cette forme.

Mais l'interdiction faite aux banques centrales de financer directement les Etats crée à lui seul un cercle vicieux infernal. Pour se financer les Etats doivent faire appel au système financier privé qui, lui, se finance aussi auprès des banques centrales. Ainsi les Etats financent-ils leur déficit à 3% (par exemple) auprès de banques privées qui trouvent des fonds à 1% auprès des banques centrales.

Les institutions financières disposent aussi d'une autre source de financement: les baisses d'impôts, les exonérations fiscales attribuées au nom des meilleurs arguments et autres boucliers fiscaux justifiés par le chantage à l'expatriation. Cette source de financement, créant un défaut de recettes dans les budgets publics, garantit la nécessité d'emprunter pour les Etats, sécurise le marché des dettes publiques pour les institutions financières privées.

Mais à force d'augmentation, les dettes publiques augmentent les risques de défaut de paiement. Pour attirer les financeurs, les Etats financent les agences de notation dans l'espoir d'obtenir le AAA rassurant "les marchés". Et la BCE veut maintenant verrouiller ce cercle vicieux appauvrissant les populations.

La suppression des niches fiscales, essentiellement mises en place au bénéfice des réductions d'impôt sur les sociétés et à la faveur des classes sociales les plus aisées, comblerait la moitié du déficit public français.

Une cinquantaine de très grands groupes sont devenus si puissants qu'ils sont parvenus à neutraliser les gouvernements et les régulateurs. Il faut les désarmer en limitant leur taille, en séparant organiquement leurs activités. Les pouvoirs publics doivent pouvoir s'appuyer sur un pôle financier public suffisamment puissant, au niveau européen comme aux niveaux nationaux.

La taxation des transactions financières ne doit pas se limiter à une simple alimentation du budget européen, mais constituer une arme contre la spéculation, complétant des outils comme l'impôt européen alimentant une véritable politique budgétaire et fiscale européenne au service d'un euro réformé de façon radicale.

Le rôle de l'Etat est de faire de l'investissement à long terme. Des dépenses considérables sont nécessaires à la transition écologique. L'heure n'est pas à la "règle d'or" - aberration politique et économique.

La campagne des primaires est marquée par la crise des dettes publiques. Les candidats se positionnent de la droite de Bayrou avec les renoncements de Manuel Valls à la gauche sérieuse et ambitieuse de Martine Aubry, en passant par le financement des nouvelles dépenses par des économies de Ségolène Royal ou la bonne gestion dans la rigueur de François Hollande.

La réponse au putsch financier de l'été confirme mon choix pour Martine Aubry comme candidate du parti socialiste à l'élection présidentielle. Des propositions montent au Front de Gauche, chez les Verts, animées par les réflexions d'Attac ou de la CGT ou de nombreux auteurs économiques. Le premier tour va clarifier la popularité des différentes propositions. Le PS doit supporter le candidat qui pourra les faire collaborer.

L'échéance électorale de 2012 nous impose de traiter l'aspect tactique des choses. Martine Aubry est la meilleure assurance contre le pire. Il semble bien qu'elle sache gouverner la construction à gauche pour laquelle nous travaillons tous avec ses trois propositions mises en avant: attaquer les niches fiscales, taxer de façon différentiée les sociétés en fonction de leurs choix de gouvernance et développer un plan d'action pour l'emploi des jeunes.